vendredi, 09 avril 2021
CHANCE (Paul GERALDY)
Et pourtant, nous pouvions ne jamais nous connaître !
Mon amour, imaginez-vous
tout ce que le Sort dut permettre
pour qu’on soit là, qu’on s’aime et pour que ce soit nous ?
Tu dis : << Nous étions nés l'un pour l'autre. >> Mais pense
à ce qu’il dut falloir de chances, de concours,
de causes, de coïncidences,
pour réaliser ça, simplement, notre amour !
Songe qu’avant d’unir nos têtes vagabondes
nous avons vécu seuls, séparés, égarés,
et que c’est long, le temps, et que c’est grand, le monde,
et que nous aurions pu ne pas nous rencontrer.
As-tu jamais pensé, ma jolie aventure,
aux dangers que courut notre pauvre bonheur
quand l’un vers l’autre, au fond de l’infinie nature,
mystérieusement gravitaient nos deux coeurs ?
Sais-tu que cette course était bien incertaine
qui vers un soir nous conduisait,
et qu’un caprice, une migraine
pouvaient nous écarter l’un de l’autre à jamais ?
Je ne t’ai jamais dit cette chose inouïe :
lorsque je t’aperçus pour la première fois,
je ne vis pas d’abord que tu étais jolie.
Je pris à peine garde à toi.
Ton amie m’occupait bien plus, avec son rire.
C’est tard, très tard, que nos regards se sont croisés.
Songe, nous aurions pu ne pas savoir y lire,
et toi ne pas comprendre, et moi ne pas oser.
Où serions-nous ce soir si, ce soir-là, ta mère
t’avait reprise un peu plus tôt ?
Et si tu n’avais pas rougi, sous les lumières,
quand je voulus t’aider à remettre ton manteau ?
Car, souviens-toi, ce furent là toutes les causes.
Un retard, un empêchement,
et rien n’aurait été du cher enivrement,
de l’exquise métamorphose !
Notre amour aurait pu ne jamais advenir !
Tu pourrais aujourd’hui n’être pas dans ma vie !…
Mon petit coeur, mon coeur, ma petite chérie,
je pense à cette maladie
dont vous avez failli mourir…
https://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_G%C3%A9raldy
14:20 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : poésie, poème, poète, culture, écriture, auteur, paul géraldy, vers, amour, couple, amoureux, coeurs
vendredi, 26 mars 2021
QUARTIER LIBRE (Paroles Jacques Prévert)
J'ai mis mon képi dans la cage
et je suis sorti avec l'oiseau sur la tête
Alors
on ne salue plus
a demandé le commandant
Non
on ne salue plus
a répondu l'oiseau
Ah bon
excusez moi je croyais qu'on saluait
a dit le commandant
Vous êtes tout excusé tout le monde peut se tromper
a dit l'oiseau.
12:10 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (18) | Tags : poésie, poème, poète, culture, prévert, paroles
mercredi, 17 mars 2021
Bernard de Ventadour : J'AI LE COEUR
J’ai le cœur si plein de joie,
Qu’il transmute Nature :
C’est fleur blanche, vermeille et jaune
Qu’est pour moi frimas ;
Avec le vent et la pluie
S’accroît mon bonheur.
Aussi mon Prix grandit, monte ;
Et mon chant s’épure.
J’ai tant d’amour au cœur
De joie et de douceur,
Que gelée me semble fleur,
Et neige, verdure.
Je puis aller sans habits,
Nu dans ma chemise,
Car pur amour me protège
De la froide bise.
Mais est fol qui, hors mesure,
Devient indiscret.
J’eus donc souci de moi-même
Dès que j’eus requis
D’amour la toute belle
Dont j’attends tel honneur.
En lieu d’un pareil trésor
Je ne voudrais Pise.
D’amitié elle m’écarte !
Mais j’ai confiance,
Car d’elle j’ai du moins conquis
La belle apparence.
Et j’en ai, en la quittant,
Tant d’aise en mon âme
Que le jour de la revoir
Serai sans tristesse.
Mon cœur est près d’Amour :
Donc l’esprit là-bas court,
Mais le corps ici, ailleurs,
Est loin d’elle, en France.
Je garde bonne espérance,
- Qui m’aide bien peu -
Car mon âme est balancée
Comme nef sur l’onde.
Du souci qui me déprime
Où m’abriterai-je ?
La nuit il m’agite et jette
Sur le bord du lit :
Je souffre plus d’amour
Que l’amoureux Tristan
Qui endura maints tourments
Pour Iseult la blonde.
Ah Dieu! que ne suis-je aronde
Pour traverser l’air,
Voler dans la nuit profonde
Jusqu’en sa demeure ?
Bonne dame si joyeuse,
Votre amant se meurt ;
Je crains que mon cœur se fonde
Si mon mal ne cesse…
Dame, je joins les mains,
Je prie : je vous adore.
Beau corps aux fraîches couleurs,
Bien cruel vous m’êtes !
Au monde il n’est rien à quoi
Mon esprit tant songe
- Si j’entends rien dire d’elle -
Que mon cœur ne tourne,
Que mon front ne s’en éclaire,
De quoi que je parle ;
Aussitôt vous penserez
Que je voudrais rire.
Si pur est mon amour,
Que maintes fois je pleure,
C’est pour moi les soupirs
Ont saveur meilleure.
Messager, va et cours,
Dis moi à la plus belle
Que je pâtis pour elle
Douleur et martyre.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Bernard_de_Ventadour
18:09 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : poésie, poème, poète, écriture, auteur, vers culture
samedi, 20 février 2021
SONNET ASTRONOMIQUE de Charles CROS
Alors que finissait la journée estivale,
Nous marchions, toi pendue à mon bras, moi rêvant
A ces mondes lointains dont je parle souvent.
Aussi regardais-tu chaque étoile en rivale.Au retour, à l’endroit où la côte dévale,
Tes genoux ont fléchi sous le charme énervant
De la soirée et des senteurs qu’avait le vent.
Vénus, dans l’ouest doré, se baignait triomphale.Puis, las d’amour, levant les yeux languissamment,
Nous avons eu tous deux un long tressaillement
Sous la sérénité du rayon planétaire.Sans doute, à cet instant deux amants, dans Vénus,
Arrêtés en des bois aux parfums inconnus,
Ont, entre deux baisers, regardé notre terre.https://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Cros
15:07 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : poésie, poète, poème, culture, auteur, sonnet, vers
mercredi, 27 janvier 2021
POUR LES ENFANTS ET POUR LES RAFFINES (Max JACOB)

dimanche, 20 décembre 2020
POUR NOEL, DEUX CONTES
16:49 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : noël, joyeux noël, conte, fête, joyeuses fêtes
mardi, 31 mars 2020
FRANCOIS COPPEE : LA MORT DES OISEAUX
Le soir, au coin du feu, j'ai pensé bien des fois
A la mort d'un oiseau, quelque part, dans les bois,
Pendant les tristes jours de l'hiver monotone,
Les pauvres nids déserts, les nids qu'on abandonne,
Se balancent au vent sur le ciel gris de fer.
Oh ! comme les oiseaux doivent mourir l'hiver !
Pourtant, lorsque viendra le temps des violettes,
Nous ne trouverons pas leurs délicats squelettes
Dans le gazon d'avril, où nous irons courir.
Est-ce que les oiseaux se cachent pour mourir ?
https://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7ois_Copp%C3%A9e
22:25 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : poésie, poème, poète, auteur, vers, recueil, culture, littérature
samedi, 14 mars 2020
NICOLAS BOILEAU : A mon jardinier, Epître
Antoine, de nous deux, tu crois donc, je le voi,
Que le plus occupé dans ce jardin, c'est toi.
Oh ! que tu changerais d'avis et de langage,
Si, deux jours seulement, libre du jardinage,
Tout à coup devenu poète et bel esprit,
Tu t'allais engager à polir un écrit
Qui dît, sans s'avilir, les plus petites choses,
Fît des plus secs chardons des œillets et des roses,
Et sût même aux discours de la rusticité
Donner de l'élégance et de la dignité...
... Bientôt, de ce travail devenu sec et pâle,
Et le teint plus jauni que de vingt ans de hâle,
Tu dirais, reprenant ta pelle et ton râteau :
"J'aime mieux mettre encor cent arpents au niveau,
Que d'aller follement, égaré dans les nues,
Me lasser à chercher des visions cornues,
Et, pour lier des mots si mal s'entr'accordants,
Prendre dans ce jardin la lune avec les dents. »
Approche donc, et viens; qu'un paresseux t'apprenne,
Antoine, ce que c'est que fatigue et que peine.
L'homme ici-bas, toujours inquiet et gêné,
Est, dans le repos même, au travail condamné.
La fatigue l'y suit. C'est en vain qu'aux poètes
Les neuf trompeuses Sœurs, dans leurs douces retraites,
Promettent du repos sous leurs ombrages frais :
Dans ces tranquilles bois, pour eux plantés exprès,
La cadence aussitôt, la rime, la césure,
La riche expression, la nombreuse mesure,
Sorcières, dont l'amour sait d'abord les charmer,
De fatigues sans fin viennent les consumer.
Sans cesse, poursuivant ces fugitives fées,
On voit sous les lauriers haleter les Orphées.
15:02 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : poésie, poète, poème, écriture, auteur, classique, culture, littérature
samedi, 11 janvier 2020
POEME DE FRANCOIS 1ER (1494 - 1547)
Les belles amourettes
Où êtes-vous allées mes belles amourettes ?
Changerez-vous de lieu tous les jours ?
A qui dirai-je mon tourment,
Mon tourment et ma peine ?
Rien ne répond à ma voix,
Les arbres sont secrets, muets et sourds
Où êtes -vous allées, mes belles amourettes ?
Changerez-vous de lieu tous les jours ?
Ah ! puisque le ciel le veut ainsi
Que mon mal je regrette,
Je m’en irai dedans les bois
Conter mes amoureux discours,
Où êtes-vous allées , mes belles amourettes ?
Changerez-vous de lieu tous les jours ?
14:21 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : poésie, poème, poète, françois 1er
samedi, 23 novembre 2019
IDEES (Raymond QUENEAU)
Les oiseaux bleus dans l'air sont verts dans la prairie
Qui les entend les voit qui les voit les entend
Leur aile déployée élargit leur patrie
Mais à travers leur plume un feu toujours s'étend.
Caméléons du ciel agiles que l'œil transperce nuages qui vivants assument tour à tour la forme d'une idée et puis l'idée adverse protéens dont l'azur ne limite aucun tour.
Ils volent à travers la sublime excellence des principes divins scellés sur l'horizon les étoiles parfois dénotent leur présence et les jeux de la lune au cours d'une saison.
17:32 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : queneau raymond, poésie, poème, oiseaux, nature, ciel, nuages, culture, poète