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jeudi, 13 octobre 2022

LA LUNE DES FLEURS (Marceline DESBORDES VALMORE - 1786-1859)

Douce lune des fleurs, j'ai perdu ma couronne !
Je ne sais quel orage a passé sur ces bords.
Des chants de l'espérance il éteint les accords,
Et dans la nuit qui m'environne,
Douce lune des fleurs, j'ai perdu ma couronne.

Jette-moi tes présents, lune mystérieuse,
De mon front qui pâlit ranime les couleurs ;
J'ai perdu ma couronne et j'ai trouvé des pleurs ;
Loin de la foule curieuse,
Jette-moi tes présents, lune mystérieuse.

Entrouvre d'un rayon les noires violettes,
Douces comme les yeux du séduisant amour.
Tes humides baisers hâteront leur retour.
Pour cacher mes larmes muettes,
Entrouvre d'un rayon les noires violettes !

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jeudi, 15 septembre 2022

Charles CROS - RONDE FLAMANDE

À Mademoiselle Mauté de Fleurville.
 
 
Si j’étais roi de la forêt,
   Je mettrais une couronne
Toute d’or ; en velours bleuet
           J’aurais un trône,
 
En velours bleu, garni d’argent
   Comme un livre de prière,
J’aurais un verre en diamant
           Rempli de bière,
 
Rempli de bière ou de vin blanc.
   Je dormirais sur des roses.
Dire qu’un roi peut avoir tant
           De belles choses.
 
                     *
 
Dire qu’un roi prend quand il veut
   La plus belle fille au monde
Dont les yeux sont du plus beau bleu.
           Et la plus blonde,
 
Avec des tresses comme en a
   Jusqu’aux genoux, Marguerite.
Si j’étais roi, c’est celle-là
           Que j’aurais vite.
 
                     *
 
J’irais la prendre à son jardin,
   Sur l’eau, dans ma barque noire.
Mât de nacre et voile en satin.
           Rames d’ivoire.
 
Satin blanc, nacre et câbles d’or...
   Des flûtes, des mandolines
Pour bercer la belle qui dort
           Sur des hermines !
 
                     *
 
Hermine, agrès d’or et d’argent.
   Doux concert, barque d’ébène,
Couronne et verre en diamant...
           J’en suis en peine.
 
Je n’ai que mon coeur de garçon.
   Marguerite se contente
D’être ma reine en la chanson
           Que je lui chante.
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jeudi, 14 juillet 2022

LE FOU (ALOYSIUS BERTRAND)

La lune peignait ses cheveux avec un démêloir d'ébène
qui argentait d'une pluie de vers luisants les collines,
les prés et les bois.

Scarbo, gnome dont les trésors foisonnent, vannait sur
mon toit, au cri de la girouette, ducats et florins qui
sautaient en cadence, les pièces fausses jonchant la rue.

Comme ricana le fou qui vague, chaque nuit, par la cité
déserte, un oeil à la lune et l'autre - crevé !

- " Foin de la lune ! grommela-t-il, ramassant les jetons
du diable, j'achèterai le pilori pour m'y chauffer au
soleil ! "

Mais c'était toujours la lune, la lune qui se couchait. -
Et Scarbo monnoyait sourdement dans ma cave ducats et
florins à coups de balancier.

Tandis que, les deux cornes en avant, un limaçon qu'avait
égaré la nuit, cherchait sa route sur mes vitraux lumineux.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Aloysius_Bertrand

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mardi, 31 mai 2022

REVEIL (Georges CHENNEVIERE 1884-1927)

Je n'ai pas ouvert les yeux,

Et je sens que le jour point.

Mon corps reste dans le lit,

Mais mon âme est déjà loin.

 

Elle goûte parmi l'aube

Un bonheur aérien,

Et revient de temps en temps

Me rappeler que j'existe.

 

La fenêtre est grande ouverte

Avec le store baissé.

Je suis baigné du même air

Que les feuilles et les nids...

 

On dirait que les oiseaux

Chantent tous dans le même arbre,

Et j'entends le bruit d'épingles

De leurs pattes sur les toits.

 

On n'a pas encor marché

Sur le sable des jardins,

Et toutes les rues sans hommes

Sont pareilles à des routes.

 

On arrose la chaussée ;

Mes draps me semblent plus frais.

Je sens l'odeur du savon

Qui est près de la cuvette.

 

Le fleuve s'est rajeuni

D'une eau qui a traversé

Les campagnes et la nuit.

Remorqueur, tu peux chanter.

 

Le canal n'a plus de rides :

Marinier, tu peux partir.

L'aube est pleine de voyages

Qui ne devraient pas finir...

 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Georges_Chennevi%C3%A8re

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vendredi, 20 mai 2022

DOUCE PLAGE OU NAQUIT MON AME (Paul-Jean TOULET 1867-1920)

Douce plage où naquit mon âme ;

Et toi, savane en fleurs

Que l'Océan trempe de pleurs

Et le soleil de flamme ;

Douce aux ramiers, douce aux amants,

Toi de qui la ramure

Nous charmait d'ombre et de murmure,

Et de roucoulements ;

Où j'écoute frémir encore

Un aveu tendre et fier -

Tandis qu'au loin riait la mer

Sur le corail sonore.

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vendredi, 11 mars 2022

LE PRINTEMPS ET L'AUTOMNE (Pierre Jean de BERANGER - 1780-1857)

Deux saisons règlent toutes choses,
Pour qui sait vivre en s'amusant :
Au printemps nous avons les roses,
A l'automne un jus bienfaisant.
Les jours croissent, le cœur s'éveille ;
On fait le vin quand ils sont courts.
Au printemps, adieu la bouteille !
En automne, adieu les amours !

Mieux il vaudrait unir sans doute
Ces deux penchants faits pour charmer
Mais pour ma santé je redoute
De trop boire et de trop aimer.
Or, la sagesse me conseille
De partager ainsi mes jours :
Au printemps, adieu la bouteille !
En automne, adieu les amours !

Au mois de mai, j'ai vu Rosette,
Et mon cœur a subi ses lois.
Que de caprices la coquette
M'a fait essuyer en six mois !
Pour lui rendre enfin la pareille,
J'appelle octobre à mon secours.
Au printemps, adieu la bouteille !
En automne, adieu les amours !

Je prends, quitte et reprends Adèle,
Sans façons comme sans regrets.
Au revoir, un jour me dit-elle ;
Elle revient longtemps après.
J'étais à chanter sous la treille :
Ah ! dis-je l'année a son cours.
Au printemps, adieu la bouteille !
En automne, adieu les amours !

Mais il est une enchanteresse
Qui change à son gré mes plaisirs.
Du vin elle excite l'ivresse,
Et maîtrise jusqu'aux désirs.
Pour elle ce n'est pas merveille
De troubler l'ordre de mes jours,
Au printemps avec la bouteille,
En automne avec les amours.

PIERRE JEAN DE BERANGER.jpg

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre-Jean_de_B%C3%A9ranger

 

19:29 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (10)

dimanche, 27 février 2022

SOLEIL DE MARS (Jacques PREVERT)

à Cécile Miguel

Orange des orangers
citrons des citronniers
olives des oliviers
ronces des ronceraies
Mystères fastueux et journaliers

La vie est belle
je me tue à vous le dire
dit la fleur
et elle meurt

Sans répondre à la fleur
l’homme traverse le jardin
l’homme traverse la forêt
sans jamais adresser la parole à son chien
Survie verte

La grenade éclate pour la soif
la figue tombe
pour la faim
la fleur de l’artichaut
dans le ciel du matin
jette sa clameur mauve et dédaignée
Seulement pour la couleur
seulement pour la beauté

Secrets intacts
splendeur publique de l’histoire naturelle

Univers de Cécile Miguel
Elle était là présente
dans la lumière ardente
Le paysage s’est jeté sur elle
et lui a dit
qu’elle était amoureuse de lui

C’est vrai que je t’aime
a dit Cécile Miguel
et dans ses toiles
l’eau souterraine des Alpes-Maritimes
murmure qu’elle l’aime aussi.

PREVERT.jpg

mardi, 22 février 2022

LE PECHEUR A LA LIGNE (Tristan DEREME)

Vainement un peuple s'indigne

Du temps que perd,

Sous son chapeau doublé de vert,

Le mortel qui pêche à la ligne.

Au soleil ou dans la fraîcheur

Qu'un bois lui verse,

Il rit à l'ombre que traverse

L'éclair d'un bleu martin-pêcheur.

Il rêve, et rêve d'une sole

Ou d'un poisson aérien ;

Mais c'est un sage : il se console

S'il ne prend rien.

A son logis, il rentre, et dîne

D'une sardine

A l'huile. Il a le coeur tremblant,

Car devant la sardine, il songe...

Il voit la dorade et l'éponge,

Et sous ses yeux un requin plonge

Dans cette boîte de fer-blanc.

Il peut être loin de la grève :

Il suffit de faire un beau rêve...

(Philippe HUC, dit Tristan DEREME, ami de Paul-Jean TOULET et de Francis CARCO, est l'auteur de poèmes fantaisistes et brillants dont le désenchantement perce sous l'humour. Il publia également des chroniques mêlées de vers, L'escargot Bleu, l'Onagre Orangé).

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dimanche, 23 janvier 2022

PAUL VALERY (extrait de UNE CHAMBRE CONJECTURALE)

Le livre fermé, ivre de l'ivresse supérieure des imaginations rapides assimilées, je courus à travers la campagne en un torrent de pensées emporté. 

Et je ne voyais rien. Ma vie s'opposait à moi et je la regardais hors de moi comme un roman, lu dans mon cerveau.

Si bien que soudain réveillé par un coup de soleil entre des buissons, ou un sifflet de machine - qu'importe - Je vis ! et de suite, s'écrivit le paysage apparu, dans mon esprit.

"La ville", maintenant, brillait au loin - Suite réelle aux imaginaires chapitres déjà parcourus.

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mercredi, 01 décembre 2021

CHANSON GOTHIQUE (Gérard de Nerval)

Belle épousée,
J'aime tes pleurs !
C'est la rosée
Qui sied aux fleurs.

Les belles choses
N'ont qu'un printemps,
Semons de roses
Les pas du Temps !

Soit brune ou blonde
Faut-il choisir ?
Le Dieu du monde,
C'est le Plaisir.

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