jeudi, 27 mai 2021
COMPLAINTE DE LA LUNE EN PROVINCE (Jules LAFORGUE)
Ah ! la belle pleine Lune,
Grosse comme une fortune !
La retraite sonne au loin,
Un passant, monsieur l’adjoint ;
Un clavecin joue en face,
Un chat traverse la place :
La province qui s’endort !
Plaquant un dernier accord,
Le piano clôt sa fenêtre.
Quelle heure peut-il bien être ?
Calme Lune, quel exil !
Faut-il dire : ainsi soit-il ?
Lune, ô dilettante Lune,
À tous les climats commune,
Tu vis hier le Missouri,
Et les remparts de Paris,
Les fiords bleus de la Norvège,
Les pôles, les mers, que sais-je ?
Lune heureuse ! ainsi tu vois,
À cette heure, le convoi
De son voyage de noce !
Ils sont partis pour l’Écosse.
Quel panneau, si, cet hiver,
Elle eût pris au mot mes vers !
Lune, vagabonde Lune,
Faisons cause et mœurs communes ?
Ô riches nuits ! je me meurs,
La province dans le cœur !
Et la lune a, bonne vieille,
Du coton dans les oreilles.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Jules_Laforgue
mercredi, 12 mai 2021
LE COUCHER DU SOLEIL ROMANTIQUE (Charles BAUDELAIRE)
Que le soleil est beau quand tout frais il se lève,
Comme une explosion nous lançant son bonjour !
- Bienheureux celui-là qui peut avec amour
Saluer son coucher plus glorieux qu'un rêve !
Je me souviens !... J'ai vu tout, fleur, source, sillon,
Se pâmer sous son oeil comme un coeur qui palpite...
- Courons vers l'horizon, il est tard, courons vite,
Pour attraper au moins un oblique rayon !
(photo personnelle, en Auvergne)
11:33 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : poèmes, poésie, poète, soleil, vers, romantisme, romantique, culture, écriture
mardi, 20 avril 2021
Fernando PESSOA
Suis ta destinée,
Arrose les plantes,
Aime les roses.
Le reste est l’ombre
D’arbres étrangers.
La réalité
Est toujours plus ou moins
Que ce que nous voulons.
Nous seuls sommes toujours
Égaux à nous-mêmes.
Vivre seul est doux,
Vivre simplement,
Toujours, est noble et grand,
Sur les autels, en ex-voto
Pour les dieux, laisse la douleur.
Regarde la vie de loin.
Ne l’interroge jamais.
Elle ne peut rien
Te dire. La réponse
Est au-delà des dieux.
Mais sereinement
Imite l’Olympe
Au fond de ton coeur.
Les dieux sont dieux
Parce qu’ils ne se pensent pas.
6 juillet 1935
Je ne pense à rien,
et cette chose centrale, qui n’est rien,
m’est agréable comme l’air de la nuit,
frais en contraste avec le jour caniculaire.
Je ne pense à rien, et que c’est bon !
Ne penser à rien,
c’est avoir une âme à soi et intégrale.
Ne penser à rien,
c’est vivre intimement
le flux et le reflux de la vie…
Je ne pense à rien.
C’est comme si je m’étais appuyé
dans une fausse posture.
Un mal aux reins, ou d’un côté des reins,
mon âme a la bouche amère :
c’est que, tout bien compté,
je ne pense à rien,
mais vraiment à rien,
à rien…
https://fr.wikipedia.org/wiki/Fernando_Pessoa
08:07 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : poésie, poète, poème, culture, vers, écriture, lisbonne, fernando pessoa
vendredi, 09 avril 2021
CHANCE (Paul GERALDY)
Et pourtant, nous pouvions ne jamais nous connaître !
Mon amour, imaginez-vous
tout ce que le Sort dut permettre
pour qu’on soit là, qu’on s’aime et pour que ce soit nous ?
Tu dis : << Nous étions nés l'un pour l'autre. >> Mais pense
à ce qu’il dut falloir de chances, de concours,
de causes, de coïncidences,
pour réaliser ça, simplement, notre amour !
Songe qu’avant d’unir nos têtes vagabondes
nous avons vécu seuls, séparés, égarés,
et que c’est long, le temps, et que c’est grand, le monde,
et que nous aurions pu ne pas nous rencontrer.
As-tu jamais pensé, ma jolie aventure,
aux dangers que courut notre pauvre bonheur
quand l’un vers l’autre, au fond de l’infinie nature,
mystérieusement gravitaient nos deux coeurs ?
Sais-tu que cette course était bien incertaine
qui vers un soir nous conduisait,
et qu’un caprice, une migraine
pouvaient nous écarter l’un de l’autre à jamais ?
Je ne t’ai jamais dit cette chose inouïe :
lorsque je t’aperçus pour la première fois,
je ne vis pas d’abord que tu étais jolie.
Je pris à peine garde à toi.
Ton amie m’occupait bien plus, avec son rire.
C’est tard, très tard, que nos regards se sont croisés.
Songe, nous aurions pu ne pas savoir y lire,
et toi ne pas comprendre, et moi ne pas oser.
Où serions-nous ce soir si, ce soir-là, ta mère
t’avait reprise un peu plus tôt ?
Et si tu n’avais pas rougi, sous les lumières,
quand je voulus t’aider à remettre ton manteau ?
Car, souviens-toi, ce furent là toutes les causes.
Un retard, un empêchement,
et rien n’aurait été du cher enivrement,
de l’exquise métamorphose !
Notre amour aurait pu ne jamais advenir !
Tu pourrais aujourd’hui n’être pas dans ma vie !…
Mon petit coeur, mon coeur, ma petite chérie,
je pense à cette maladie
dont vous avez failli mourir…
https://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_G%C3%A9raldy
14:20 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : poésie, poème, poète, culture, écriture, auteur, paul géraldy, vers, amour, couple, amoureux, coeurs
vendredi, 02 avril 2021
FILS DE LA VIE
La vie se tricote
Et se détricote
Le bonheur se défile
Les soucis s'enfilent
Ils te piquent ton coeur
Tu dessines des fleurs
Au fil de tes toiles
Sur des échantillons
Des croix en médaillon
Gondolent les motifs
De tes soucis chétifs.
(Un de mes poèmes écrit le 24 août 2013 illustré par un de mes dessins)
12:17 Publié dans Mes poèmes | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : poésie, poème, poète, vie, tricot, fleurs, toiles médaillons, vers, rimes
samedi, 20 février 2021
SONNET ASTRONOMIQUE de Charles CROS
Alors que finissait la journée estivale,
Nous marchions, toi pendue à mon bras, moi rêvant
A ces mondes lointains dont je parle souvent.
Aussi regardais-tu chaque étoile en rivale.Au retour, à l’endroit où la côte dévale,
Tes genoux ont fléchi sous le charme énervant
De la soirée et des senteurs qu’avait le vent.
Vénus, dans l’ouest doré, se baignait triomphale.Puis, las d’amour, levant les yeux languissamment,
Nous avons eu tous deux un long tressaillement
Sous la sérénité du rayon planétaire.Sans doute, à cet instant deux amants, dans Vénus,
Arrêtés en des bois aux parfums inconnus,
Ont, entre deux baisers, regardé notre terre.https://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Cros
15:07 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : poésie, poète, poème, culture, auteur, sonnet, vers
mercredi, 27 janvier 2021
POUR LES ENFANTS ET POUR LES RAFFINES (Max JACOB)

mardi, 31 mars 2020
FRANCOIS COPPEE : LA MORT DES OISEAUX
Le soir, au coin du feu, j'ai pensé bien des fois
A la mort d'un oiseau, quelque part, dans les bois,
Pendant les tristes jours de l'hiver monotone,
Les pauvres nids déserts, les nids qu'on abandonne,
Se balancent au vent sur le ciel gris de fer.
Oh ! comme les oiseaux doivent mourir l'hiver !
Pourtant, lorsque viendra le temps des violettes,
Nous ne trouverons pas leurs délicats squelettes
Dans le gazon d'avril, où nous irons courir.
Est-ce que les oiseaux se cachent pour mourir ?
https://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7ois_Copp%C3%A9e
22:25 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : poésie, poème, poète, auteur, vers, recueil, culture, littérature
samedi, 22 février 2020
PETITS TRESORS
Au fond des armoires
Des petits trésors
Que l'on a oubliés
Nous attendent.
17:09 Publié dans Mes poèmes | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : poèmes, poésie, poète, écriture, vers, ma vie, placards, armoires, tiroirs
samedi, 05 octobre 2019
LA CIGALE (Paul-Jean TOULET)
Quand nous fûmes hors des chemins
Où la poussière est rose,
Aline, qui riait sans cause
En me touchant les mains ; -
L’Écho du bois riait. La terre
Sonna creux au talon.
Aline se tut : le vallon
Etait plein de mystère…
Mais toi, sans lymphe ni sommeil,
Cigale en haut posée,
Tu jetais, ivre de rosée,
Ton cri triste et vermeil.
23:50 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : poésie, poème, poète, vers, culture, écriture, recueil, cigale, paul-jean toulet