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lundi, 05 novembre 2018

LES POILUS

Extrait du journal de guerre 1914 de mon grand-père paternel paru dans mon livre ARTHUR ET MADELEINE, chez TheBookEdition

https://www.thebookedition.com/fr/arthur-et-madeleine-p-8...

 

Le 22 août : à 2 heures debout. Les balles tombent toujours. L’émotion est très grande dans la nuit. On part sur les hauteurs vers la droite que nous occupions la veille. Longwy brûle toujours. Des nuages rapides emmenés par le vent déjà violent filent au ciel vers le sud. Enfin l’aube vient, le ciel est rouge. Dans les avoines, on n’observe rien. Au loin quelques coups de fusil. Le petit jour vient. Le 46ème aux avant-postes donne le refrain. Les bois se dessinent toujours parmi les champs d’avoine. La brume se lève, matinale. Plus rien. On attend environ une heure. Enfin l’ordre de partir en Belgique. On part à travers les champs de trèfle et d’avoine. La rosée tombe et pénètre dans les souliers. On est arrivés à Romain. On marche en colonne de Compagnies à travers les champs. On arrête à 100 mètres du pays. Halte. On se repose. On attend. Tout à coup, les balles pleuvent. On se couche sur le chemin. J’en profite pour me glisser derrière un tas de cailloux. Plusieurs balles tapent derrière moi sur le chemin et passent en sifflant dans les orties dont est bordé le chemin. Je bondis jusqu’à la 1èremaison et je me mets à l’abri avec tous ceux qui y sont déjà.

Les chefs ne savent plus, perdent la tête. Pour comble on n’a pas d’éclaireurs. Certains disent que c’est le 2ème bataillon qui tire sur nous, d’autres le 46ème. On joue les refrains des 2 régiments. Nouvelle grêle de balles. Les gens se cachent dans les avoines. La fusillade n’arrête pas. On se rue dans les maisons et quand tout le monde est rentré, là horreur ! Terrible méprise ! Le 46ème tirait sur nous. Cela nous a coûté 2 morts et 5 blessés restés sur le terrain. On rassemble. Tout le monde est consterné. Barrier et Accault sont là pour toujours enveloppés dans la mort. Nous avons reçu le vrai baptême du feu par nos propres balles.

Tout à coup en face : Ploc ! Ploc ! Ploc ! D’autres balles sifflent et ce sont des boches ! Poubeau monte à la crête à environ 200 mètres du village et nous rapporte son renseignement. On occupe les 1ères maisons et les murs de jardins et du cimetière, et on fait face à l’ennemi. Plusieurs montent dans les greniers. Je les suis, mais au moment de tirer par la lucarne, une balle passe projetant le plâtre du mur sur la figure, je sens qu’il ne faut pas insister. Je redescends, je me mets au mur avec d’autres et, de là, on tire sur les boches qui paraissent à la crête. Mais aussitôt ils sont nettoyés. Tous tombent. C’est un enfer. Les balles sifflent de partout. Un instant, ils sont descendus à mi-côte tout près d’un noyer et d’une meule de paille et on les oblige à remonter la côte sous notre feu. Ils ne peuvent avancer. Une batterie se met de la partie et on entend passer nos obus qui fauchent derrière la crête les tirailleurs venus des bois voisins. L’ennemi hésite. Quelques Compagnies du 46ème passent derrière nous et battent en retraite, venant de la droite. Tout le monde part et il ne reste plus au mur que le Lieutenant Kern avec une dizaine d’hommes. Il nous supplie de partir mais on n’entend rien. Le bruit est épouvantable. Je tire sur ceux que je vois mais je m’arrête bientôt car les cartouches s’épuisent et je ne peux plus tenir mon fusil qui me brûle les mains.

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Commentaires

Ton récit me bouleverse, Elisabeth car mon grand-père Louis était à Verdun. Tous ces témoignages sont autant de preuves de cette foutue guerre. De chaque côté ils ont souffert et combien sont-ils morts pour rien?... Je t'embrasse, ma belle.

Écrit par : Nell | lundi, 05 novembre 2018

un livre à lire et acheter

Écrit par : laura | lundi, 05 novembre 2018

Bon soir Elisabeth,
Un extrait qui prend aux tripes, là on est dedans et ce n'est pas un film, c'est du vécu et c'est d'autant plus fort.
Quand je lis la carte que tu joins, je retrouve l'écriture de mes grands parents, c'était tout un art à cette époque, un art perdu à présent.
Merci pour ce partage.
Incroyable l'histoire de cette petite dame avec les chasseurs, ils ne respectent vraiment rien. Je les déteste et pourtant, ce n'est pas dans mon tempérament.
Bises et bonne soirée

Écrit par : Pascale MD | mardi, 06 novembre 2018

Pascale : pour la copine de la cousine de ma mère, les chasseurs se moquent du monde, j'espère qu'elle les connait et qu'ils pourront être pénalisés. Bonne journée et bises.
Laura : j'ai mis le lien sur mon FB, on ne sait jamais... bonne journée. Bises.
Nell : en ces moments de commémoration, il est important d'en parler pour les enfants qui ne sont pas encore trop au courant et qui découvrent. Bonne journée et gros bisous.

Écrit par : Elisabeth | mercredi, 07 novembre 2018

Je suis très ému en lisant ton texte. Notre famille a passé sous les guerres. Et nous avons tous survécu...

Écrit par : Binh An | mercredi, 07 novembre 2018

Bonjour Babeth
Toujours bien triste de lire ces livres, ces pauvres gens ont bien souffert pendant cette guerre
Tu écris très bien bravo
Je te souhaite une bonne journée et un bon week-end, bisous

Écrit par : Noisette | jeudi, 08 novembre 2018

Noisette : c'est mon grand-père qui a écrit ces mots, pas moi. Merci de ton passage, bonne soirée. Bises.
Binh An : Novembre permet de faire un hommage à tous ces soldats. Bonne soirée et bises.

Écrit par : Elisabeth | jeudi, 08 novembre 2018

Je vais parler d'une expo événement dans un de mes lycées

Écrit par : laura | dimanche, 11 novembre 2018

Une bien triste période... Et dire que 22 ans plus tard, on a recommencé ! Chris

Écrit par : Chris | mercredi, 14 novembre 2018

Ton grand-père écrivait bien et son récit est émouvant. Bonne soirée

Écrit par : écureuil bleu | jeudi, 15 novembre 2018

Laura : merci pour le lien, je vais aller retourner lire car je l'ai vu jeudi.
Ecureuil : oui, il écrivait bien, c'était clair. Bon week end. Bises.
Chris : quand je vois que peu de choses déclenche des violences, je me dis que ce n'est pas demain que nous aurons la paix.

Écrit par : Elisabeth | samedi, 17 novembre 2018

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