jeudi, 19 octobre 2006
MON PREMIER DEMENAGEMENT
J'ai deux ans et demi et ma mère attend son quatrième enfant. Elle a 27 ans. Mon père nous prend en photo, mon frère, ma soeur, ma mère et moi, devant ce qui fût notre maison car aujourd'hui nous déménageons. Nous partons dans une nouvelle maison à l'autre bout de la ville, une maison que mes parents ont fait construire dans un quartier calme, près des écoles de filles et de garçons.
Ma mère porte un long manteau qui cache sa grossesse arrivée à terme. Elle me donne la main gauche et de la main droite je tiens mon petit sac à main rouge. J'ai mis mes chaussures blanches. Je porte aussi un manteau comme mon frère et ma soeur. Nous sommes photographiés devant la porte d'entrée, sur les marches qui donnent sur le trottoir et la route pavée.
Mon frère se tient tout droit comme un soldat au "garde à vous". Il porte un manteau clair et ma soeur se tient entre ma mère et mon frère en penchant la tête car elle s'est mise un peu derrière ma mère. Elle tient son petit sac beige de la main droite.
Nous voilà partis pour notre nouvelle maison. Dans le jardin, je ne vois aucun arbre, aucune fleur, même pas une herbe qui pousse dans ce qui fut un chantier de construction. En entrant dans la maison, je sens l'odeur du platre et du bois neuf. Quand nous nous parlons, nos voix résonnent car mes parents n'ont pas beaucoup de meubles.
Je n'aime pas cette maison : les murs sont blancs et les fenêtres sans peinture, elle est impersonnelle. Je dis à ma mère que je veux revenir dans l'autre maison car j'y ai mes souvenirs... Mais elle me répond que ce n'est pas possible. Mon frère et ma soeur partent à l'école et je reste seule avec ma mère. Je ne veux pas manger, je ne veux pas jouer, je m'ennuie toute seule.
Puis, quelques semaines après le déménagement, je m'en vais passer quelques jours chez mon grand père et ma grand mère à l'autre bout de la ville, accompagnée de mon frère et de ma soeur. Ma grand mère s'absente une demi-journée et mon grand père nous garde tous les trois. Il nous fait des clins d'oeil complices en sortant un paquet de bonbons du vieux buffet de la cuisine. Il m'apprend à écrire, à lire, je joue avec les voitures de mon frère. Ma soeur joue aux cartes avec mon grand père qui fume la pipe.
Quand nous revenons, nous découvrons un bébé aux cheveux noirs, dans un berceau là haut, dans une des chambres. C'est une petite soeur, mignonne. C'est la première fois que je vois un bébé. On dirait une poupée. Je suis heureuse. Je voudrais la prendre dans mes bras comme le fait ma maman. Je l'aime tellement cette petite soeur que je retrouve l'appétit et j'oublie ma peine causée par le déménagement.
15:25 Publié dans Souvenirs | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : journal intime, écriture, culture
Commentaires
très beau récit
Écrit par : laura | jeudi, 19 octobre 2006
Tes mots qui touchent tutoient les continents de nos souvenirs
Écrit par : Pierre | jeudi, 19 octobre 2006
Merci Pierre et Laura.
Écrit par : elisabeth | jeudi, 19 octobre 2006
merci à toi pour ta fidélité à mon blog
bonne journée
bisous
p.s: avec mes déménagements, je pourrais faire un roman bien que le premier ait été beaucoup plus tard que toi
mais après....
encore un projet d'écriture et le temps passe si vite...
Écrit par : laura | vendredi, 20 octobre 2006
Marie Christine : il m'arrive aussi de retourner dans les 2 maisons de mes grands parents en rêve, dans les différentes habitations que j'ai occupées également depuis mon mariage. Merci Marie Christine.
Laura : je pense qu'on a tous des bouts de vie à raconter mais il faut avoir le temps et le talent pour l'écrire. La vie semble plate par moments mais si tu écoutes les gens raconter leur vie, cela devient intéressant.
MERCI A TOUS, Pierre, Laura et Marie Ch.
Écrit par : elisabeth | vendredi, 20 octobre 2006
je me souviens de la naissance de ma petite soeur qui est 8 ans plus jeune que moi. C'était le matin, papa est entrée dans la chambre des enfants, il a du crier quelque chose parce que mon frère et moi nous nous sommes éveillés. Je vois encore mon père dans l'encoignure de la porte inondé par le soleil matinal (c'était comme pour moi au mois de mai), il avait l'air tout heureux et il a dit "C'est une petite soeur, elle est née!". Alors, moi j'ai dit "Une petite soeur, justement je voulais une petite soeur et pas un petit frère". Et moi aussi j'étais heureuse. Et j'ai déclaré "Ce sera ma poupée vivante !". Il faut dire que maman m'avait préparée à cette idée là en me disant que je pourrais la porter dans mes bras comme mes poupées. Ce que je fis aussi quelques jours plus tard. En attendant que maman revienne à la maison, on est allé chez mes grands-parents aussi. On a fait quelques visites à la maternité voir ma poupée vivante, puis elle est venue à la maison et on est revenu aussi et je l'ai langée, je lui ai donné le biberon, j'ai attendu en attendant qu'elle fasse ses trois rots en la portant dans mes bras... J'étais une deuxième maman pour elle.
domino
Écrit par : domino | lundi, 23 octobre 2006
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