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dimanche, 11 septembre 2011

LE JOUR DE CONGE (Inès CAGNATI)

Inès CAGNATI est née en 1937 à Montclar dans le Lot et Garonne. Elle est la deuxième fille d'une famille d'Italiens, paysans pauvres. Elle a beaucoup voyagé et enseigné à l'étranger. En 1973, elle écrit son premier livre, Le Jour de Congé, qui obtient le Prix Roger-Minier. Son oeuvre suivante, Génie la folle, recevra en 1977 le Prix des Deux-Magots.

 

Je vous donne ci-dessous un extrait :

"Sans ma bicyclette je ne pourrais pas aller au lycée. Evidemment, il y a des autobus pour aller à la ville, le lundi et le samedi. Le lundi, à cause des pensionnaires au lycée, le samedi pour la même raison et à cause du marché. L'autobus coûte cher. Je ne reviens chez moi que tous les quinze jours, sauf cette semaine, mais cette semaine, c'est tout à fait exceptionnel. Je ne peux pas, tous les quinze jours, demander à mes parents de payer mes trajets en autobus. C'est déjà beaucoup qu'ils aient fini par accepter de me laisser aller au lycée, je le sais. Je ne demande rien. D'ailleurs, si je demandais, on ne me donnerait rien. C'est comme ça. Pour les trajets, je peux très bien pédaler. Je suis si contente d'aller au lycée, que je pédale avec une énergie terrible. Dans les descentes, tant je suis contente, je chante à tue-tête.

Quelquefois, je suis fatiguée et énervée, comme ce soir. Ce n'est pas du tout à cause de ma bicyclette et des trente-cinq kilomètres. Mais il fait noir comme en enfer et il a plu vraiment très fort. J'oublierai dès que j'entrerai dans la maison, avec ma mère et peut être toutes mes soeurs, qui font toujours un bruit épouvantable. Autrefois, quand je ne savais pas qu'un jour j'irais au lycée, je ne pouvais pas supporter tout ce bruit. Maintenant, il me fait presque plaisir. C'est le bruit de la maison.

J'ai laissé ma bicyclette contre le vieux mur de la grange pour plusieurs raisons qui font qu'elle ne risque absolument rien. J'en suis certaine. La maison est si loin de tout chemin praticable en hiver, si loin de toute autre habitation, perdue derrière les bois, les ruisseaux et les eaux sauvages des marécages, que personne ne peut passer par ici cette nuit. Ou alors, il s'agirait d'un fou et s'il s'agit d'un fou, ma bicyclette n'est pas plus en sécurité dans la cour de ma maison que contre le mur de la grange. Alors. Et puis, personne, je veux dire de sensé, bien sûr, ne peut raisonnablement convoiter ma bicyclette. Pour un voleur, ce serait se jeter passionnément dans les bras des gendarmes. Chacun sait, dans mon village, que les voleurs ne rient pas du tout dans les bras des gendarmes. Un voleur étranger et ignorant pourrait passer, mais par une nuit pareille, ce serait vraiment étonnant. Sauf le vieil Espagnol qui vit avec sa chèvre, n'importe qui serait englouti par les eaux sauvages des marécages avant d'arriver ici. Et même si quelqu'un arrivait, par extraordinaire, et prenait ma bicyclette, il serait vite retrouvé...

... En vérité, d'origine, il ne reste à ma bicyclette que son cadre. La rouille qui le ronge et le troue m'indique assez que je dois me dépêcher de faire mes études si je veux qu'il me porte au lycée jusqu'au bout".

écriture,livre,litterature,société,journai intime,nouvelles et textes brefs.

 

 

 

Commentaires

Dans les CDI, on les trouve ringardes pour les gamins, moi, j'aime!

Écrit par : laura | lundi, 12 septembre 2011

Ah, voilà un texte qui me replonge dans de lointains souvenirs, ces années d'adolescence où je ne disposais que d'une bicyclette pour mes déplacements. 35 kilomètres, c'est long !

Écrit par : Louis le bipolaire | lundi, 12 septembre 2011

c'est vrai 35Km c'est beaucoup.... belle journée.

Écrit par : patriarch | lundi, 12 septembre 2011

Le jour de congé c'est si important lorsque l'on travaille ! Alors courage Elisabeth, bientôt ta retraite et ce sera tous les jours congé ! Bises

Écrit par : danae | lundi, 12 septembre 2011

Bonjour
Et oui maintenant il y a les voitures pour amener les enfants a l'école et je pense pas qu'ils voudraient y aller a bicyclette !!! surtout tant de kilomètres et sous la pluis ça devait quand même être très dur.
Bonne soirée bisous

Écrit par : noisette | mardi, 13 septembre 2011

elle mérite bien ses 2 prix !
merci du partage et bonne journée
arielle

Écrit par : arielle | mercredi, 14 septembre 2011

Je devais parcourir 5 km pour me rendre à l école en vélo, matin et soir, le midi je mangeais au bistrot. Les soucis ne m étaient pas épargné, il y avait les chiens, la boue qui se logeait partout, et les crevaisons. Par contre pas de problémes éconnomiques, j en avais trois. J ai lu le texte qui me plait beaucoup, bien écrit de maniére trés simple.
Bonne journée Elisabeth
Latil

Écrit par : Latil | vendredi, 07 octobre 2011

Latil : ce fut rude pour toi. J'ai eu la chance d'habiter dans la même rue que les écoles, le collège et le lycée.
Arielle : oui j'ai été séduite par ce livre.
Noisette : plein de voitures pour que les enfants puissent aller plus vite à l'école.
Danae : je pense à ce jour là et j'espère qu'il va bientôt arriver mais je sais qu'il me faut encore patienter.
Patriarch et Louis : oui cela semble très loin 35 kms. Il faut du courage.
Laura : c'est pourtant un témoignage du passé pas si lointain que cela.

Écrit par : elisabeth | samedi, 08 octobre 2011

Je vais voir si ce livre est à la médiathèque. Merci du partage Elisabeth !

Écrit par : Sabine | dimanche, 02 septembre 2012

Sabine : je l'ai donné à ma mère qui est en maison de retraite. Il est touchant à lire.

Écrit par : elisabeth | mardi, 04 septembre 2012

Les commentaires sont fermés.